L’idée est venue à Alain Ducasse qui au Château de Versailles pour le restaurant Ore, l’une de ses plus récentes initiatives, a imaginé une carte structurée et servie selon le cérémonial du Roi Soleil Invité à Turin pour organiser le dîner le plus important de la deuxième édition de Très bien, les cinq jours célébrant la culture et la gastronomie piémontaises, notait : « Ici vous avez la Reggia di Venaria, un petit Versailles, pourquoi ne pas en profiter pour une soirée avec toute la splendeur de l’époque : la scénographie, les intermèdes musicaux, les apparaissant. Mais, bien sûr, « en contemporaine », dans une interprétation contemporaine ».
Et donc la semaine dernière, avec 120 invités en attente, je me suis assis sous les stucs de la Galerie Diana de la Reggia, née à la fin du XVIIe siècle pour les plaisirs de chasse de Carlo Emanuele II de Savoie, pour participer au « Dîner du temps« . Une provocation »ElectroPastics”Créé par Samuel Romano, de la Subsonica, élaborant des compositions de Vivaldi. En redingote noire sur la console, aux lumières stroboscopiques pulsantes, rythment les intermèdes de la soprano et des danseurs, il met en scène le Jeu du temps recherché, ou l’inconnu de l’absence d’un hôte à sa propre invitation. Solution du mystère ludique : la magie du dîner et de la scène suspend le passage des heures pour les convives.
Pendant ce temps, dans les entreacts, se déroulait le très attendu dîner à quatre mains « évolutif » : ceux des 19 étoiles Michelin, Alain Ducasseà la tête d’un groupe qui contrôle 20 restaurants et 1 400 salariés dans le monde, et ceux de Davide Oldani, il y a vingt ans son apprenti dans les cuisines de l’Hôtel de Paris à Monte-Carlo, aujourd’hui l’un des chefs de référence de la haute cuisine italienne. Un hommage de l’élève à l’enseignant, une reconnaissance de l’enseignant à l’élève.
Aux tables, parmi les convives, quelques présences emblématiques des saveurs turinoises : Giuseppe Lavazzacafé et Guido Gobino, le chocolat. Et de la gastronomie mondiale : Ferran Adria Et Luis Andoni Aduriz.
Ligne de départ : Alain Ducasse. « Daurade de Noirmoutier poêlée, carottes d’Allones, soucis », un ceviche moderne et une leçon : trois ingrédients parfaits suffisent pour faire un plat parfait. Poisson croustillant, carottes sucrées, souci épicé.
Davide Oldani : « Truffe blanche, sauce aux morilles, compote de myrtilles, chapelure, riz ». La truffe est aromatique, les morilles sont crémeuses et terreuses, les gouttes de myrtille sont acidulées, les miettes sont croquantes et les haricots sont parfaitement cuits.
Ducasse : « Veau « grain de soie » grillé, chou vert, piment doux, houblon ». Un veau « haute couture », élevé dans les Pyrénées, tendre mais compact, chou et houblon fumé au gril avec une pointe d’amertume très actuelle.
Oldani : « Mou, chocolat et or » : désormais un classique très gourmand, désirable de tous les instants.
Dans les verres, le Piémont et le Champagne du producteur Alberto Massucco, qui, souhaitant à tout prix signer un Champagne à son nom, rachète un vignoble à Reims. « Bravo », dirait Ducasse.
Le vrai plaisir ? Pour moi un dîner où le faste n’a pas troublé le plaisir. Et je crois que même les stucs et les voûtes de la Diana Gallery ont hâte de renouveler l’expérience.