Val d’Aoste, un voyage à l’ombre des châtaigniers

La Cucina Italiana

Vous irez vers le Val d’Aoste. Dans la basse vallée ils vous accueilleront rangées de vignes cultivées sur des « terrasses » harmonieusement disposées le long des pentes des montagnes. Vous observerez les pierres tissées ensemble en suivant les courbes de niveau. Une terrasse chevauche l’autre. Le jardin vertical s’élève jusqu’à l’endroit où la vigne ou le blé peuvent porter leurs fruits. La lumière révèle les reflets verts et bleus des smaragdites triées à sec. Avant d’entrer dans le Vallée de l’Ayasse, vous pourrez déguster d’excellents biscuits méliga presque partout dans la région. Un froid matin de printemps, al Mill Bar à Honej’ai accompagné mon « double risotto en grande tasse » de pommes fraîchement sorties du four…

Tandis que vous marchez vers Champorcher, je vais vous dire deux ou trois choses sur ces gens. Outre le maïs, le châtaigne c’était un fruit très précieux. Parfois, la propriété de plants de châtaigniers cela ne coïncidait pas avec la propriété foncière. Le propriétaire des plants récoltait les fruits et utilisait le bois. Le propriétaire du terrain était autorisé à récolter les feuilles, précieuses pour la litière dans les écuries et le tanin dans l’art de la teinture. Pain aux châtaignes, galettes aux châtaignes, soupe aux châtaignes, lait de châtaigne et riz, miel de châtaignier: des aliments précieux pour nos agriculteurs et alpinistes. Si vous le souhaitez, vous pourrez acheter ici d’excellentes châtaignes séchées et les cuisiner avec du vin blanc, du miel, de l’anis étoilé. Je les accompagne au saindoux cochon alpin noir, tanné et fabriqué par un ami boucher, mais je vous le dirai plus tard. Sachez qu’à 88 kilomètres de Champorcher, près de La Salle, vit le Tsahagnèr de Derby, un châtaignier de plus de 400 ans.

La route monte abruptement dans la vallée qui devient étroite et profonde. Vous pourrez apercevoir des petits hameaux et des maisons aux toits en pierres équarries, biseautées et superposées. La pose des carreaux, en pierre de Luserna, est un art transmis de père en fils. Ici dans Val d’Aostele métier est en plein essor.

Vous arriverez enfin à Champorcher. Il ne faut pas manquer de traverser les eaux transparentes et tumultueuses de l’Ayasse en passant par les magnifiques ponts à bosse. Le long du ruisseau, il y avait des moulins pour moudre le grain, battre la fibre de chanvre. Au centre de la ville se trouve le four banal, aujourd’hui inactif, mais heureusement restauré. Le pain noir, presque toujours à base de seigle, était préparé par les familles une fois par an et cuit au four communal. La sole du four était en prasinite, une roche qui absorbe la chaleur et la restitue. Il était pétri dans l’étable car il était chaud et riche en charge bactérienne ce qui aidait déclencher le levain. Dans les mois suivants, le pain était coupé avec le copapan, levier en fer tranchant qui surmonte la dureté du pain. La soupe la plus énergique était définitivement là seupa de l’âne (soupe d’âne) : pain de seigle, vin et sucre. On en donnait également à l’âne pour le ranimer.
À Champorcher, un jour d’automne, j’entrai dans l’église dédiée à Saint Nicolas. Sur l’autel, à côté de l’Evangile ouvert, sur une plaque de bois il y avait un micooula seigle. Elle avait été offerte au curé de la paroisse par une famille sinistrée. Il est de coutume, lorsqu’un membre du village décède, que la famille apporte une miche de pain au curé du lieu : le « Pain du Pardon ». Don Giuliano, curé, fils des montagnes de cette commune, partage la douleur de sa communauté avec le « Pain du Partage ». Vous aurez le plaisir, en entrant dans ce petit temple, d’admirer les trois autels baroques sculptés avec un savoir-faire rare en pin parasol et en bois de tilleul par des sculpteurs ambulants anonymes venus de Valsesia. Maintenant, vous vous dirigerez vers le Coopérative Lou Dzeut, Chardonney hameau 42. Sachez que les femmes et les hommes de cette commune laborieuse, l’hiver, pour compléter leurs revenus, filaient et tissaient des étoffes de chanvre qu’ils revendaient au printemps. Dans les étables chaudes, où l’on faisait le pain, on plaçait la charpente en mélèze. L’humidité était constante, indispensable au tissage du chanvre, par nature rugueux et rigide. A la coopérative vous verrez des merveilles. Parmi les nombreuses et magnifiques nappes sur lesquelles déposer et offrir le pain et le vin de ces vallées pour dresser une table d’une rare hospitalité. Prendre la route.